Je vous répondrai par la mine de mon crayon.

Il y a plusieurs façon de crier, ma préférée c'est le silence.

vendredi 10 décembre 2010

La louve

Par Jani Greffe Bélanger

«Je ne retomberai jamais en enfance,j'y suis toujours resté»
-TRISTAN BERNARD-

Depuis quelque temps, j’écris au « nous ». J’ai peur pour une génération entière, pour une planète, pour une société ou pour nous tous, tout simplement. J’écris des phrases interminables qui traduisent parfaitement mon essoufflement, ma peur et ma déstabilisation. Je vacille ou j’avance sur un tapis roulant qui me fait travailler, mais stagner. Je m’étourdis de propos, de mots, d’idées, de convictions et de biens d’autres illusions. Je parle, je parle, plus qu’à l’habitude. J’arrive à formuler des idées qui étaient floues pour moi auparavant. Je verbalise ma tête et par le fait même, mon cœur. Ma tête à la fâcheuse habitude féminine de ne jamais vouloir aller quelque part sans la compagnie de son copain, le cœur.

Mais qu’est-ce que je dis vraiment? Qu’est-ce que je raconte? Qu’est-ce que je fais avancer de la sorte? Pourquoi ai-je décidé de prendre la parole? Pour me défiler encore une fois. J’ai pris mes grands mots, mes grandes phrases, mes concepts et mes images, puis je les ai étalés sans gêne sur la table. Je dirais même sans filtre, sans recul et sans objectivité. L’objectivité, c’est tellement abstrait pour moi…

Je suis une louve qui a froid. Je suis une louve qui se tient près des gens. Elle montre les dents pour défendre son clan. Elle défend chacun, sans regarder derrière, sans se demander pourquoi elle le fait. Elle a compris que pour survivre, elle doit les garder près d’elle. Elle ne se pose pas de question. La louve pleure quand les siens n’y arrivent pas. La louve rit quand les siens sont heureux. La louve est une éponge. La louve n’est pas une sainte, elle est simplement peureuse. Elle a affreusement peur du noir, c’est pourquoi elle montre les crocs… c’est impressionnant et ça tient les gens loin.

La louve, c’est celle qui marche au centre de la meute, la tête ni haute, ni basse. Tant que les autres marchent, elle suivra. C’est aussi celle qui se cachera lorsqu’elle est blessée, pour ne pas nuire aux loups et sentir qu’elle est un fardeau. Elle se retira, pour lécher ses plaies en espérant que le clan lui redonnera sa place. Elle a besoin de comprendre sa blessure, pour ne plus avoir à la soigner, parce que quand on marche en regardant devant, parfois on pose le pied sur des épines. Si un autre membre de la meute essaie de venir se coller le museau contre elle pour la réconforter, elle grognera. Elle sait qu’accepter l’aide, c’est accepter d’être vulnérable, accepter d’avoir mal devant les autres. Elle n’insiste pas longtemps et elle sait très bien que sa respiration sera plus calme dans son sommeil, si elle accepte de dormir près d’un des siens.

Elle n’est pas si bizarre la louve. Elle fait partie de la bande et tient à y rester. Elle n’a qu’une conviction, marcher dans le même sens que les autres. Et tout le clan peut alors dire, peu importe leur direction : « C’est pas nous qui marchons pas droit, c’est les autres qui vont de travers ». Et la louve même si elle marche de travers, même si elle formule mal ses phrases, même si elle a la capacité de tenir des silences interminables, elle continue à marcher… Marchez avec elle…

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